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  UN PÈRE EN " SUR-BRILLANCE ": SAINT-JOSEPH
Je voudrais, par cet article, contribuer à " démystifier " saint . Joseph. Pas pour l'abaisser, bien sûr, mais au contraire pour le glorifier, le mettre en évidence et volontairement en sur-brillance. Car c'est à tort, à mon sens, ou en tout cas de façon tout à fait gratuite, qu'on le situe d'ordinaire " à l'ombre. " Qu'il soit, dans la Sainte Famille, l'Ombre du Père céleste, comme on l'a écrit, c'est d'accord ; mais pourquoi à partir de là, vouloir le faire disparaître au niveau social ? Rien ne nous y oblige à partir des textes, et c'est le moins qu'on puisse dire ; rien ne nous y invite non plus à partir de sa mission.

Pour ce qui est des textes, nous savons qu'il était un lointain descendant du roi David (comme on pouvait en recenser un millier environ en Israël à son époque), qu'il était marié à une femme de lignée sacerdotale, père enregistré d'un garçon, artisan dans une petite ville de Galilée appelée Nazareth. Pour ce qui est de sa mission, il a été choisi par la droite de Dieu pour légitimer, aux yeux de tous la naissance du Verbe incarné et l'insérer normalement dans la société juive, tout en voilant son identité jusqu'au jour de la révélation en Israël.

On infère de ce dernier point qu'il devait mener une existence sans relief social afin que les regards ne se tournent de trop vers l'enfant du Mystère. N'était-ce pas requis en outre par la vertu d'humilité que Jésus donnerait comme soubassement au valeurs du Royaume? Je ne suis pas du tout d'accord. La vertu d'humilité est supposée, certes, et elle sera vécue à un degré inouï d'effacement par notre Patriarche, mais elle ne l'obligeait en rien à disparaître. D'ailleurs, comment pouvoir lui imposer ou lui supposer un profil bas quand on a du " sang bleu " dans les veines, qu'on a épousé une fille de la tribu de Lévi (cousine du prêtre Zacharie, vous vous souvenez), et tout simplement quand on est artisan avec sa clientèle dans un petit village ? En voulant exalter son héroïque discrétion par rapport à l'enfant divin qu'il abrite sous son toit, on risque d'en faire un personnage falot, très éloigné, j'en suis sûr, de la réalité.

C'est que la vie cachée du Christ, qui doit effectivement protéger comme telle, n'est pas cachée par quelque repliement à l'ombre, elle l'est dans l'anonymat ou au milieu des hommes, sans attirer plus que d'autres, mais pas moins non plus, leur attention. Joseph doit veiller à ce que son fils ne soit pas mis en relief singulier, c'est tout. Or il n'est pas requis pour cela qu'il soit lui-même dans l'ombre, il suffit qu'il fasse de l'ombre à Jésus, ce n'est pas pareil. Pour cela on peut le laisser jouer son rôle normal de menuisier à Nazareth, voire avec une certaine classe de par son ascendance, le projecteur étant alors sur lui et non sur le " petit ". Joseph " cache " bien plus Jésus en concentrant éventuellement les regards sur sa propre personne, l'" autre ", étant dans son dos, qu'en le mettant en coulisse.

Je craindrais de commettre une bourde, sinon un blasphème, en appliquant à notre cas une formule courante dans les comparaisons fils et père, mais assurément il serait bien caché celui dont on pourrait dire qu'il n'arrive pas à la cheville de l'autre. N'insistons pas.

A notre époque " en manque de pères ", " en recherche de pères ", dans " une société sans père " (ce sont les titres de. livres récents), alors que nous avons à réhabiliter la virilité, surtout dans une année jubilaire comme la présente, destinée à glorifier, non seulement, Celui de qui vient toute paternité au ciel et sur la terre, mais les pères charnels eux-mêmes, il semble bienvenu de mettre ainsi en "sur-brillance" la stature humaine de saint Joseph.

L'Ombre du Père céleste, oui, mais comme on le dit du prolongement, de l'accompagnement, de l'émanation d'un grand personnage.

Marchons mars 99

A la découverte d'un prince discret (P. Francis VOLLE C.P.C.R.)
Editions Joyeuse Lumière, 21 bis rue Dareau, 75014 Paris, Tel. 01 45 81 08 73